
Etat d'urgence sanitaire : est-il possible de licencier ?
Auteur : Marie-Alice BRET
Publié le :
09/04/2020
09
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04
2020
Le premier Ministre a rapidement démenti les rumeurs relatives à l’impossibilité de licencier durant la période d’état d’urgence sanitaire décidée depuis le 24 mars 2020 pour une durée de deux mois.
Lors de son allocution télévisée du 17 mars dernier, le premier Ministre a confirmé que les licenciements ne sont pas souhaités mais restent possibles durant cette période de crise sanitaire, aucune interdiction administrative de licenciement n’ayant été prise.
Il faut cependant relativiser cette possibilité et rappeler que le virus du COVID-19 et l’état d’urgence sanitaire qui en résulte, ne constituent pas en tant que tels des motifs de licenciement.
Pour mémoire, il existe deux grandes catégories de licenciement :
- le licenciement pour motif personnel que l’on peut décomposer en deux sous-catégories :
- le licenciement pour motif disciplinaire (faute simple, faute grave, faute lourde) ;
- le licenciement pour motif non-disciplinaire (insuffisance professionnelle, inaptitude, refus de modification du contrat de travail…).
- le licenciement pour motif économique qui constitue un motif de licenciement non-inhérent à la personne du salarié (contrairement à la catégorie précédente) résultant de la situation économique de l’entreprise.
Le licenciement pour motif non-disciplinaire reste lui aussi possible à condition que ses motifs ne soient pas en lien avec la crise sanitaire et les mesures de confinement actuelles.
Dans tous les cas, le régime et la procédure habituels continuent de s’appliquer et le licenciement doit toujours reposer sur une cause réelle et sérieuse.
Le licenciement pour motif économique risque de susciter l’intérêt de nombreuses entreprises dont l’activité se trouve dégradée en cette période de crise sanitaire.
Néanmoins, rien ne semble moins simple que de recourir à ce mode de rupture du contrat de travail compte tenu de son régime strict et de sa procédure contraignante. Sans compter que l’employeur doit, avant tout licenciement pour motif économique, informer l’inspection du travail (DIRECCTE) voire même recueillir son autorisation préalable (en fonction du nombre de licenciements envisagés) ; et que l’on peut aisément s’attendre à un contrôle encore plus strict de l’inspection du travail pour limiter ce type de licenciement en période de crise sanitaire.
Il convient également de souligner que le Gouvernement a entendu assouplir et élargir le recours au dispositif de l’activité partielle afin, justement, d’éviter que les employeurs aient recours aux licenciements pour motif économique. Le licenciement pour motif économique semble ainsi difficilement invocable pour les entreprises qui recourent massivement au dispositif d’activité partielle.
À cet égard, la circulaire DGEFP n°2013-12 du 12 juillet 2013 relative à l’activité partielle dont une partie reste applicable à ce jour, prévoit bien, qu’en cas de plan de sauvegarde de l’emploi, le recours à l’activité partielle n’est pas impossible, à condition néanmoins que les salariés concernés par l’activité partielle gardent un lien contractuel avec l’employeur durant toute la période d’activité partielle.
Enfin, le licenciement de salarié protégé reste soumis à l’autorisation préalable de l’inspection du travail même si l’instruction de la Direction générale du travail du 17 mars 2020 a prévu des aménagements de la procédure d’autorisation relatifs notamment à la consultation numérique des pièces (et plus physique) et à l’enquête contradictoire menée par consultation écrite ou visioconférence (et plus via des entretiens physiques sauf cas exceptionnels).
Ainsi, le recours au licenciement n’est pas impossible durant la période d’état d’urgence sanitaire, mais nécessite une vigilance accrue tant sur les motifs que sur la procédure. Il est probable en effet que les licenciements prononcés pendant cette période se traduisent par une augmentation des contentieux portés devant les juridictions dès leur réouverture.
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